écrit par Kosisochukwu Charity Ani

Alors que l’intelligence artificielle (IA) transforme peu à peu l’ensemble des secteurs d’activité, les gouvernements multiplient les initiatives pour intégrer l’enseignement de l’IA dans les programmes scolaires nationaux. Cette démarche vise à préparer les nouvelles générations à évoluer dans un monde de plus en plus numérique, où l’IA jouera un rôle déterminant dans la structuration du marché du travail et de la société.

Selon un rapport de McKinsey, près de 40 % des tâches professionnelles pourraient être automatisées d’ici 2030. Dans ce contexte, le développement des compétences liées à l’IA devient une priorité pour les autorités publiques à travers le monde.

Plusieurs pays du Moyen-Orient, d’Europe et d’Asie figurent parmi les précurseurs en matière d’intégration de l’IA dans leurs systèmes éducatifs. De l’Arabie saoudite à la Corée du Sud, en passant par les Émirats arabes unis (EAU) et la Finlande, ces États préparent les élèves — de la maternelle à l’université — à un avenir guidé par les données, les algorithmes et l’apprentissage automatique. En parallèle, l’Afrique, forte de sa population jeune en pleine expansion, commence à prendre conscience de l’enjeu que représente l’éducation à l’IA pour combler le fossé numérique et encourager l’innovation.

Moyen-Orient : une intégration portée par les gouvernements

Arabie saoudite : la Vision 2030 pour former une main-d’œuvre technologique

Dans le cadre de sa stratégie Vision 2030, l’Arabie saoudite prévoit d’introduire l’enseignement de l’IA à tous les niveaux scolaires dès cette année académique.
En avril, l’Autorité saoudienne des données et de l’intelligence artificielle (SDAIA) a annoncé la création d’un cours intitulé Introduction à l’intelligence artificielle, destiné aux élèves de troisième année du secondaire.
Cette initiative, inscrite dans le programme Human Capability Initiative, constitue une première étape vers l’intégration de l’IA dans l’ensemble des cursus, avec pour objectif de favoriser l’émergence d’une culture de l’innovation.
Ce projet s’inscrit dans la volonté du Royaume de former une génération à la fois compétente en technologies et moteur d’innovation dans différents secteurs.

Émirats arabes unis : une volonté affirmée de développer la culture numérique

Les Émirats arabes unis ont également entrepris d’importantes réformes en matière d’éducation à l’IA. Le pays prévoit d’introduire cette matière dans le programme scolaire national, de la maternelle jusqu’à la terminale.
L’objectif : former une jeunesse numériquement compétente et capable de devenir un acteur majeur des technologies de demain.

Sur la plateforme X (anciennement Twitter), le cheikh Mohammed ben Rachid Al Maktoum a annoncé l’adoption du « programme final pour introduire l’intelligence artificielle comme matière dans toutes les étapes de l’enseignement public, de la maternelle à la 12e année », à compter de la prochaine rentrée.

Au-delà de la simple acquisition de compétences techniques, les Émirats entendent également sensibiliser les élèves aux dimensions éthiques de l’IA. La ministre de l’Éducation, Sarah Al-Amiri, a souligné que cette intégration reflète « la vision tournée vers l’avenir du gouvernement des Émirats », selon une déclaration relayée par l’agence WAM. Les réformes visent à aligner le système éducatif sur les exigences du monde contemporain et à outiller les jeunes pour faire face aux évolutions du marché du travail.

Europe : des approches innovantes pour l’enseignement de l’IA

Estonie : un modèle d’e-gouvernement appliqué à l’école

Réputée pour son avance en matière de gouvernance numérique, l’Estonie est également pionnière dans l’intégration de l’IA à l’école. Dès septembre 2025, environ 20 000 élèves de 10e et 11e années, ainsi que 3 000 enseignants, auront accès à des applications pédagogiques basées sur l’IA dans le cadre de l’initiative AI Leap. D’ici 2026, le programme s’étendra aux établissements de formation professionnelle, touchant ainsi 38 000 élèves et 2 000 enseignants supplémentaires.

Cette approche proactive vise à préparer les jeunes aux défis et opportunités générés par l’IA dans tous les domaines.

Finlande : un apprentissage accessible à tous

La Finlande mise sur une démocratisation de l’enseignement de l’IA. Son cours en ligne « Elements of AI » a déjà été suivi par plus de 220 000 personnes, aussi bien des élèves que des adultes. Ce programme vise à vulgariser l’IA et à la rendre accessible à l’ensemble de la population, y compris à ceux qui n’ont pas de connaissances préalables en programmation ou en mathématiques.

Lancé en mai 2023, ce cours gratuit en ligne propose une initiation aux concepts de base de l’IA, tels que l’apprentissage automatique et les réseaux de neurones. L’objectif affiché est d’inciter 1 % de la population finlandaise à suivre la formation d’ici la fin de l’année, favorisant ainsi l’apprentissage tout au long de la vie et une meilleure compréhension du monde numérique.

Asie : personnalisation et apprentissage assisté par l’IA

Corée du Sud : des manuels numériques sur mesure

La Corée du Sud modernise son système éducatif avec l’introduction, en mars 2025, de manuels scolaires numériques basés sur l’IA. Ces outils pédagogiques seront adaptés aux besoins de chaque élève et fourniront un retour immédiat grâce à l’analyse des performances. Destinés dans un premier temps aux élèves du primaire et du secondaire, ils concerneront des matières comme l’anglais, les mathématiques, l’informatique et la langue coréenne.

Malgré certaines inquiétudes exprimées par des parents sur le temps d’écran et les risques de désinformation, cette initiative val la plateforme X orise l’apprentissage personnalisé. L’objectif à long terme est de généraliser l’usage de l’IA à tous les niveaux scolaires d’ici 2025, afin de développer chez les élèves des compétences de pensée critique et de résolution de problèmes.

Singapour : un cap clair vers la maîtrise de l’IA

Singapour s’est fixé pour objectif de former 100 000 personnes à l’IA d’ici 2025. Son espace d’apprentissage numérique, le Student Learning Space (SLS), s’appuie sur une plateforme personnalisée exploitant l’IA pour adapter les parcours pédagogiques aux besoins spécifiques de chaque élève.

Grâce à cet accompagnement individualisé, les élèves progressent à leur rythme, l’IA jouant un rôle de guide et non de substitut aux enseignants. Cette approche met l’accent sur l’utilisation de l’IA comme outil de renforcement de l’enseignement traditionnel, dans un cadre interactif et engageant.

Afrique : surmonter les obstacles pour bâtir l’avenir

Contrairement aux pays du Moyen-Orient, d’Europe et d’Asie, l’Afrique se heurte à plusieurs difficultés pour intégrer l’IA dans ses systèmes éducatifs : instabilité de l’approvisionnement électrique, déficit de compétences techniques, programmes scolaires obsolètes, entre autres. Pourtant, le continent dispose d’un atout majeur : une jeunesse nombreuse et dynamique, porteuse d’un potentiel de transformation numérique.

Des pays comme le Kenya, le Nigeria ou encore l’Afrique du Sud commencent à prendre des mesures en faveur de l’éducation à l’IA. Au Kenya, le programme Ajira Digital forme les jeunes aux compétences nécessaires pour réussir dans l’économie numérique. Le Nigeria et l’Afrique du Sud investissent également dans des centres technologiques et des programmes éducatifs axés sur l’IA, afin de préparer leur jeunesse aux exigences du marché de demain.

Pour le continent, l’investissement dans l’enseignement de l’IA représente un enjeu crucial pour son développement économique. En dotant les jeunes générations des compétences requises, l’Afrique pourrait franchir les obstacles traditionnels au développement et s’imposer comme un acteur clé dans la révolution technologique mondiale.

Une course mondiale vers l’éducation à l’IA

Face à l’évolution rapide des technologies, les pays se mobilisent pour garantir à leurs élèves les compétences nécessaires à un avenir dominé par le numérique. Arabie saoudite, Corée du Sud, Émirats arabes unis, Estonie, Finlande et Singapour font figure de pionniers dans cette course mondiale, intégrant l’IA dans leurs cursus nationaux afin de former une génération d’innovateurs.

Bien que confrontée à d’importants défis, l’Afrique dispose d’une marge de progression considérable grâce à sa population jeune. En investissant dès aujourd’hui dans l’éducation à l’IA, les nations africaines peuvent se positionner en acteurs majeurs de l’économie numérique mondiale et faire de leur jeunesse non pas de simples utilisateurs, mais des créateurs de technologie.

L’intégration mondiale de l’IA dans les systèmes éducatifs constitue un tournant majeur pour la formation des professionnels de demain. Les pays en avance sur ce chemin montrent la voie ; il appartient désormais au reste du monde de suivre pour garantir à tous un avenir numérique équitable.