L’organe indépendant en charge des élections au Cameroun vient de lancer une page Facebook officielle dans le but de lutter contre la désinformation liée au processus électoral.

Au Cameroun, la lutte contre la désinformation mobilise désormais aussi bien les institutions publiques que les organisations parapubliques et la société civile. Face à son impact croissant, ce phénomène est perçu comme une menace majeure. Dans ce contexte, divers acteurs s’engagent, chacun selon ses compétences et ses moyens, pour y faire face.

C’est dans cette dynamique qu’Elections Cameroon (Elecam), l’organe en charge des élections au Cameroun, a récemment lancé une page Facebook officielle. Son objectif est clair : lutter contre la désinformation, la mésinformation et les fausses nouvelles en période électorale.« Par cette démarche, Elecam indique au public camerounais et international qu’il est désormais possible de contrer la désinformation et les fake news en vérifiant directement à la source »explique Brice NGOLZOK, journaliste, expert et formateur en citoyenneté numérique au Cameroun. Il rappelle que cet organe indépendant a longtemps fait l’objet de nombreuses spéculations autour de ses missions, très souvent relayées sur les réseaux sociaux où sa présence était jusque là très limitée.« Aujourd’hui, Elecam entend simplement gommer cela »,ajoute-t-il.

Dans cette optique, Elecam vise d’abord à renforcer sa présence sur les réseaux sociaux, comblant ainsi un vide qui avait été perçu comme une absence injustifiée. Dans un contexte où l’institution est régulièrement accusée d’opacité, de manipulation, de connivence et de favoritisme concernant les listes électorales et l’ensemble du processus électoral, cette action permet à Elecam de répondre directement aux préoccupations des citoyens.

A l’approche des élections prévues pour octobre prochain au Cameroun, la question de l’impact de cette initiative sur la diffusion des fausses informations liées au scrutin reste pertinente. Selon Brice Ngolzok, les effets risquent d’être limités :« Bien que l’idée soit bonne, Elecam ne pourra pas aller au-delà de ce que j’ai dit précédemment car il ne dispose pas de moyens matériels, techniques et financiers pour mener ce combat. Il faut se rappeler que dans les textes qui l’organisent, cette mission ne fait même pas partie de ses prérogatives »souligne-t-il.Pour lui, une réponse collective et structurée est indispensable pour faire face à la désinformation. Il insiste également sur l’importance de l’alphabétisation numérique comme point important pour atteindre les objectifs de réduction de ce phénomène de désinformation.

Ainsi, garantir un processus électoral transparent, équitable et équilibré pour l’ensemble des acteurs reste un enjeu permanent. Dans un contexte marqué par la circulation de rumeurs, de contre-vérités, de manipulations et de déclarations mensongères, cet objectif mobilise l’ensemble des parties prenantes impliquées dans ce processus.

Cependant, alors que les actions de prévention tardent à se mettre en place, les signes de désinformation se multiplient à mesure que les échéances électorales approchent. La diffusion de messages de haine incitant à la division et à la violence, le dénigrement de l’organe en charge des élections dans le but d’affaiblir la confiance des électeurs ou encore la création de faux profils des leaders politiques auxquels sont imputés des déclarations mensongères, sont autant de pratiques observées. Ces phénomènes, bien que non exhaustifs, alimentent les tensions intercommunautaires, fragilisent la cohésion sociale et représentent une menace pour le bon déroulement du processus électoral.

Toutefois, la démarche d’Elecam n’est pas à négliger. « Elle montre que la lutte contre la désinformation est prise en compte au plus haut niveau de l’État et que des solutions sont recherchées »déclareGuy Marial Abbé, journaliste fact-checkeur camerounais. Selon lui, cette démarche mérite d’être encouragée. « Elecam doit être soutenu par l’ensemble des acteurs. Une réponse commune et solidaire permettrait de faire face à ce phénomène », insiste-t-il.

Il convient de rappeler qu’Elecam, créé le 29 décembre 2006, a déjà supervisé deux élections présidentielles, en 2011 et en 2018. C’est la première fois que l’organe s’engage officiellement dans la lutte contre la désinformation avec pour objectif de garantir la clarté de l’information durant une élection présidentielle.

Article rédigé par Christian ESSIMI