L’éducation aux médias, les campagnes « Stop aux sorciers numériques », Africa Check et Desinfox Jeunesse renforcent la résistance des jeunes Africains face aux fake news et aux manipulations électorales.
Comment l’éducation permet de lutter contre les fake news en Afrique
Le continent africain est exposé de façon régulière aux fausses nouvelles (fake news) et à la désinformation. L’une des manières de lutter contre ce fléau passe par l’éducation de la population, dès le plus jeune âge.
Fake news en période d’élections
En matière de désinformation, tous les coups sont permis, plus encore quand les enjeux sont importants. Les différents scrutins présidentiels (Nigeria, Gabon, Liberia, République démocratique du Congo en 2023, Sénégal en 2024, Cameroun et Côte d’Ivoire en octobre 2025) l’ont rappelé, avec la diffusion d’une multitude de fausses informations destinées notamment à décrédibiliser tel ou tel candidat et à manipuler l’opinion pour capter son vote.
Face à cette menace réelle et insidieuse, la vérification des faits et l’éducation aux médias peuvent constituer de vrais remparts. Ainsi à l'approche de l'élection présidentielle de 2025, les autorités ivoiriennes ont lancé en juin 2024 la campagne "Stop aux sorciers numériques" pour sensibiliser la population aux dangers des fausses informations circulant sur les réseaux sociaux. Leur cible principale : les moins de 35 ans, parce qu’ils représentent 78 % de la population, qu’ils sont ultraconnectés et surtout parce qu’une très grande majorité d’entre eux ont tendance à partager ce qu’ils voient sans même vérifier la véracité de l’information.
Au Sénégal, l’association Africa Check, créée à Johannesbourg en 2012, a noué un partenariat avec une station de radio communautaire, Oxyjeune. Son objectif : offrir des formations en éducation aux médias en wolof, notamment pour sensibiliser le public contre la désinformation sur le Covid-19 et les vaccins. L’initiative consiste à vérifier des faits, traduire les articles en wolof et ensuite partager les informations sur WhatsApp. Ce qui constitue un premier pas vers le libre-arbitre et l’acquisition des réflexes nécessaires pour devenir des citoyens responsables.
Éducation aux média en Afrique, une volonté politique
Au mois de mai dernier, Yaoundé (Cameroun) a accueilli le Forum 2025 sur l’éducation aux médias et à l’information (EMI) dont le thème était « Réflexion pour une éducation aux médias et à l’information dans les programmes éducatifs ». L’une des présentations phares de cette rencontre fut celle du projet « Desinfox Jeunesse », initié en 2022. Ce programme, qui couvre quatre pays africains (Cameroun, RCA, RDC et Côte d’Ivoire), promeut une éducation critique face à la désinformation à travers la production et la diffusion de dessins de presse ciblant les jeunes sur leurs plateformes numériques favorites.
L’ensemble des congressistes a mis en évidence l’urgence de :
- former les enseignants aux enjeux numériques et médiatiques,
- développer des contenus pédagogiques contextualisés,
- valoriser les expériences locales déjà à l’œuvre,
- renforcer les collaborations entre ministères, ONG, écoles et médias.
Cela vaut également pour la formation des journalistes qui doivent être sensibilisés aux fake news pour éviter qu’ils ne tombent eux-même dans le piège et pour rendre la source même de l’information incontestable.
Cependant, développer une politique publique de lutte contre toutes les formes de mésinformation, malinformation et désinformation en l’inscrivant directement dans les programmes scolaires de tous niveaux (du primaire à l’université), passe aussi par une volonté politique affirmée. Il faut pour ce faire y accorder non seulement de l’attention mais aussi y consacrer des moyens financiers.
Cette lutte contre la désinformation ne se rencontre généralement qu’au sein des états démocratiques où la liberté d’opinion n’est pas muselée. Dans les pays où l’autocratie règne, les acteurs et opérateurs privés qui s’engagent dans cette voie le font généralement à leurs risques et périls.