Les femmes sont très souvent oubliées des campagnes de lutte contre la désinformation parce qu’elles sont encore invisibilisées. Les codes culturels et religieux, qui sont autant de remparts, les laissent sur le bas-côté. Certaines s’opposent à cet état de fait et tentent de faire bouger les lignes
Entre propagande genrée, désinformation et discours de haine, les réseaux sociaux africains se transforment de plus en plus en zones de danger pour les femmes et les jeunes filles. La manœuvre est insidieuse voire perverse. Les attaques, sous couvert d’humour ou d’opinion, ciblent directement les femmes qui tentent de faire entendre une voix différente, qu’elles soient médiatiquement exposées ou non. Car ces femmes dérangent.
Certaines, à l’image de la journaliste et auteure sénégalais Maimouna Hélène Diop, aborde des sujets tabous que tels que la santé reproductive, la violence de genre et les injustices sociales. Sa collègue Khady Koita est engagée dans la lutte pour les droits des femmes. Elle s’oppose notamment aux mariages forcés et d’une manière plus globale contre les violences faites aux femmes. C’est aussi la mission que s’est donnée la journaliste et activiste malienne Aïssatou Sow Sidibe, une journaliste et activiste malienne, l’une des premières à s’investir dans des mouvements féministes en Afrique de l’Ouest.
Toutes ces femmes d’influence subissent à des degrés divers des brimades, des insultes, des attaques en règle : « Chaque fois que je prends la parole sur Facebook pour dénoncer une injustice, je reçois une avalanche de messages insultants, souvent liés à mon genre et non à mes arguments », témoigne, sur le site Bambouguinée.com, Mariame Bangoura, présidente de l’ONG Fille d’Aujourd’hui, Femmes de Demain (FAFD), une ONG de défense des droits des filles et femmes en Guinée.

Désinformation sexiste : l’importance de l’indépendance éditoriale
Pour lutter contre le prolongement, sur les réseaux sociaux, des violences subies au quotidien, ces femmes se mobilisent pour la lutte contre la désinformation et l’avenir d’un journalisme indépendant en Afrique francophone.
Pas moins de 17 journalistes venues du Tchad, du Mali, du Burkina Faso, du Niger, de Côte d’Ivoire, du Sénégal, du Cameroun, du Bénin, de la Guinée, de la RDC, du Burundi et du Togo, se sont réunies en juillet dernier en Allemagne, entre Hambourg et Berlin. Objectif, répondre à de nombreuses questions : Comment adapter ces méthodes pour contrer la désinformation locale et renforcer la confiance du public ? Comment raconter la réalité, mais aussi les histoires de progrès et de développement, notamment en Afrique, au-delà des clichés de conflits ?
Conviées à la rédaction de l’hebdomadaire Der Spiegel, elles ont pu s’entretenir avec les responsables de la cellule fact-checking (vérification des faits) et ainsi être confortées dans leurs positions. Car « sans indépendance éditoriale, il est impossible de garantir une information fiable », leur a martelé Mathieu von Rohr, chef du département étranger au Spiegel.
C’est notamment le rôle d’Africa Check qui fait appel à de nombreuses femmes qui luttent contre la désinformation. Rassérénées par cette formation, les journalistes africaines sont encore plus armées pour diffuser la bonne parole auprès de la jeunesse africaine et les sensibiliser aux dangers des réseaux sociaux.

