À six mois des élections présidentielles prévues en octobre prochain, la Côte d'Ivoire est plongée dans une crise politique majeure. La radiation de Tidjane Thiam, candidat principal du Parti Démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI-RDA), de la liste électorale suscite des réactions vives et soulève des questions sur l'avenir politique du pays.

Cette décision judiciaire, prise par le tribunal de première instance d'Abidjan, est officiellement motivée par des questions de nationalité. Toutefois, elle révèle également les tensions sous-jacentes entre le pouvoir en place et l'opposition. La Côte d'Ivoire, pays d'Afrique de l'Ouest connu pour sa stabilité relative depuis la fin des conflits armés dans les années 2010, se prépare à une élection présidentielle déterminante. Dans cet objectif, le PDCI-RDA, principal parti d'opposition, avait investi Tidjane Thiam comme son candidat pour succéder au président sortant. Une ambition brutalement interrompue par une décision judiciaire qui a radié Thiam de la liste électorale. Officiellement, le tribunal estime que Tidjane Thiam perd sa nationalité ivoirienne en devenant français en 1987. Même s’il renonce finalement à cette double nationalité en mars 2025, le volte face de Thiam intervient après son inscription sur la liste électorale, le rendant inéligible au moment de son enregistrement. Cette décision repose sur l'article 48 du code du pays, stipulant que l'acquisition volontaire d'une autre citoyenneté entraîne automatiquement la perte de la nationalité ivoirienne.

En réalité, cette explication juridique masque des enjeux politiques plus profonds. Tidjane Thiam représente une figure emblématique de l'opposition au pouvoir en place. Sa candidature était perçue comme une menace sérieuse pour les ambitions du parti au pouvoir, le Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP). La radiation de Thiam est donc vue par beaucoup comme une manœuvre politique visant à éliminer un opposant potentiellement dangereux. Les conséquences de cette affaire vont bien au délà des incidences pour l’ambition du candidat. En effet, les fragilités et vulnérabilités du système politique ivoirien apparaissent désormais aux yeux de la population. En excluant Tidjane Thiam de la course présidentielle, le tribunal a non seulement privé les électeurs d'un choix démocratique important, mais il a également semé le doute sur l'intégrité du processus électoral. Cette situation rappelle les crises électorales passées en Côte d'Ivoire, où des questions de nationalité et d'éligibilité ont souvent été instrumentalisées pour écarter des candidats potentiellement gênants. 

La désinformation : un risque majeur pour les élections

La radiation de Tidjane Thiam intervient dans un contexte où la désinformation est devenue une arme redoutable en période électorale. En Afrique de l'Ouest, les campagnes de désinformation sont fréquentes et peuvent avoir des conséquences dévastatrices sur la stabilité politique. Des exemples récents au Burkina Faso, au Mali ou au Niger montrent comment la propagation de fausses informations peut alimenter les tensions sociales et politiques, menant parfois à des coups d'État. La Côte d'Ivoire n'est pas épargnée par ce phénomène. Les réseaux sociaux et l'intelligence artificielle sont souvent utilisés pour diffuser des narratifs discriminatoires et des fake news, exacerbant les divisions au sein de la population. La question de la nationalité de Tidjane Thiam a été particulièrement ciblée par ces campagnes de désinformation, avec des accusations infondées sur ses origines sénégalaises et sa double nationalité.

Pour lutter contre ce fléau, des initiatives locales ont été mises en place, en prévention d’éventuelles tentatives d’ingérence. Le Réseau des Professionnels de la Presse en Ligne de Côte d'Ivoire (REPPRELCI) a lancé le projet LUCIDE, visant à renforcer les capacités des journalistes pour vérifier les faits et identifier les discours de haine. Ce type d'initiative est nécessaire pour garantir des élections transparentes et inclusives. Dans cette logique, la radiation de Tidjane Thiam représente un danger pour la démocratie ivoirienne, puisque des zones d’ombres subsistent au sujet de la décision juridiques qui a été appliquée. Celle-ci soulève des questions sur l'indépendance de la justice et l'intégrité du processus électoral. Dans ce contexte, il est impératif de lutter contre la désinformation et de promouvoir une information vérifiée et fiable. Les élections présidentielles d'octobre 2025 seront un test majeur pour la Côte d'Ivoire, et leur succès dépendra en grande partie de la capacité du pays à garantir des conditions électorales équitables et transparentes.

En conclusion, la situation actuelle en Côte d'Ivoire appelle à une vigilance accrue. La radiation de Tidjane Thiam est un symptôme des tensions politiques sous-jacentes et des dangers liés à la désinformation. Pour préserver la démocratie et assurer des élections libres et justes, il est essentiel de renforcer les mécanismes de lutte contre la désinformation et de promouvoir une culture de transparence et d'intégrité dans le processus électoral.