Une cabale numérique qui secoue la presse

En juin 2025, une polémique enflamme les réseaux sociaux camerounais autour de la genèse de South Media Corporation (SMC), maison éditrice du quotidien Mutations. Des accusations de manipulation, de récupération politique et de réécriture de l’histoire médiatique poussent deux figures clés du projet Haman Mana, aujourd’hui directeur de publication du journal Le Jour, et Alphonse Soh, cadre à la Banque mondiale à sortir du silence pour rétablir les faits.

Une controverse alimentée par les réseaux sociaux

Tout part de déclarations attribuant à Protais Ayangma, homme d’affaires influent, la paternité exclusive du journal Mutations. Ces propos, relayés massivement en ligne, sont perçus comme une tentative de réécriture historique de ce média à des fins politiques, à quelques mois de l’élection présidentielle.

Dans un contexte où les réseaux sociaux sont devenus des amplificateurs de récits partisans, cette polémique révèle les tensions entre mémoire médiatique et enjeux électoraux.

Une mise au point historique et robuste

Dans un communiqué conjoint publié le 16 juin 2025, Haman Mana et Alphonse Soh clarifient : « L’idée de création de Mutations est née d’Alphonse Soh, qui l’a soumise à Maurice Kamto. Ce dernier a recommandé l’implication de Protais Ayangma, un ancien collaborateur. »

La société SMC est créée en 1997 sous forme de SARL, puis devient une SA en 2002. Répartition initiale du capital :

Actionnaire

Pourcentage

Protais Ayangma

39 %

Maurice Kamto

39 %

Alphonse Soh

10 %

Haman Mana

5 %

Ruth Masuke (épouse Ayangma)

7 %

En 2007, Haman Mana cède ses parts à Maurice Kamto, acte notarié à l’appui.

Les enjeux derrière la controverse

Cette affaire dépasse le cadre médiatique. Elle soulève des intérêts politiques, économiques et symboliques :

  • Protais Ayangma, proche de certains cercles d’affaires et politiques, pourrait bénéficier d’une réhabilitation publique en vue d’un positionnement stratégique.
  • Maurice Kamto, figure politique majeure, est indirectement impliqué dans la genèse du journal, ce qui alimente les interprétations partisanes.
  • Haman Mana, journaliste influent, défend une mémoire professionnelle face à la désinformation.
  • Alphonse Soh, aujourd’hui à la Banque mondiale, cherche à préserver l’intégrité historique du projet.

Dans un contexte électoral tendu, la bataille autour de l’origine de Mutations devient un champ de lutte symbolique, où chaque acteur tente de repositionner son rôle dans l’histoire médiatique nationale.

Mutations aujourd’hui : une voix toujours influente

En 2025, Mutations reste l’un des quotidiens les plus lus et respectés du paysage médiatique camerounais. Malgré les turbulences internes et les pressions politiques, le journal maintient :

  • Une ligne éditoriale indépendante et critique
  • Des enquêtes approfondies et des analyses politiques rigoureuses
  • Des partenariats avec des plateformes de fact-checking comme Africa Check

Son équipe rédactionnelle joue un rôle actif dans les débats publics, notamment à travers des tribunes et des dossiers spéciaux.

Une mémoire médiatique à préserver

L’affaire SMC rappelle que la mémoire des médias peut devenir un terrain de manipulation, surtout en période électorale. Elle pose la question de :

  • La transparence historique
  • L’intégrité du débat public
  • La protection des archives et des trajectoires collectives

Dans un contexte où les réseaux sociaux amplifient les récits approximatifs, il devient essentiel de documenter les faits, de valoriser les sources primaires, et de préserver la pluralité des voix.

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Article rédigé par Christian ESSIMI